Le krach boursier semble s’éloigner peu à peu. Ouf ou pas ouf ? La raison ? Une certaine hausse du prix du pétrole, qui pourrait venir d’un accord signé entre l’Arabie Saoudite, le Qatar, la Russie, avec peut-être l’Iran. Le contenu de l’accord ? Le gel des productions de pétrole au niveau de janvier 2015. L’idée derrière cet accord ? Évidemment arrêter la chute des prix du baril, à la suite de la guerre des productions et aussi empêcher l’Iran de pénétrer davantage sur le marché mondial et d’y augmenter ainsi sa part. Si l’Iran signe, il stabilise son chiffre d’affaires, mais s’éloigne aussi de l’idée de retrouver son ancienne part de marché mondial, celle d’avant les sanctions. Au moins, il n’entretient pas la baisse des prix – dont il pourrait souffrir. On verra plus tard, avec la reprise.
Tout cela est donc encore plus politique qu’économique ! Politique, car ce sera un accord entre Arabie Saoudite et Iran, qui ne sont pas précisément des amis. Pour le moment, on parle de débuts de pourparlers ! S’ils continuent, les marchés financiers vont adorer ! Ceci est également économique, parce que si la guerre des productions pétrolières continue, celle des prix du pétrole va suivre, donc la chute des bourses, donc celle des croissances. Au fond, l’accord en cours (s’il est esquissé, puis finalisé et mis en œuvre) pour stabiliser d’abord le prix du pétrole avant de le faire, ensuite, remonter, annonce(rait) la fin du krach boursier.
Mais l’affaire ne va pas s’arrêter là. Au contraire : ce serait trop beau ! En effet, si le prix du pétrole se met(ait) à monter, ce qui est recherché par tous, alors les anticipations d’inflation vont elles-mêmes monter. Le 2 % d’inflation que chacun obtient chez lui, aux Etats-Unis et en Europe, avec les salaires, mais qui est masqué par la baisse du prix du pétrole, va réapparaître. Le monde se rendrait alors compte qu’il a eu trop peur. Les taux des obligations ont trop baissé, en particulier en Allemagne, en Suisse et aux États-Unis – sans oublier le Japon ! Donc les rendements obligataires devraient remonter, par correction. Donc on va dire qu’un krach obligataire menace !
Le problème sera alors de le réduire. Une inquiétude excessive sur la récession et la déflation ont conduit à des comportements excessifs de recherche de sécurité. Les abris se payent toujours très cher : les taux négatifs en sont la preuve. Une correction pourrait alors se produire, qu’il sera difficile de contrer. Mais c’est aussi le prix à payer pour montrer que peu à peu l’activité économique repart et que le pire est évité, celui d’une déflation mondiale.
Alors, les banquiers centraux vont devoir éviter ce nouveau pire. Ils vont devoir regarder la façon dont, peu à peu, les anticipations d’inflation vont se remettre en ligne, vers 2 %. Ceci prendra des semaines, validant leur stratégie – mais doit être accompagné.
Bien sûr, ce scénario suppose d’abord un accord entre Arabie Saoudite et Iran qui n’est pas évident. En plus, vont rester les questions sur Daesh, sur l’Europe, sur le prochain Président ou la Prochaine Présidente américain(e), sur les tensions militaires en mer de Chine…Tout ceci ne pourra pas être effacé et va continuer à peser. Mais au moins, si la situation économique et financière s’améliore, les esprits seront mieux disposés.
C’est parfois quand le pire menace que les bonnes décisions peuvent être prises, sous l’emprise de la peur – mais ce n’est pas certain. Aujourd’hui, il n’est pas impossible qu’un retour à une certaine croissance ait lieu. Il sera payé par ceux qui ont eu trop peur. Mais pour éviter le nouveau pire, celui d’une remontée trop forte des rendements, il faut que la remontée des taux courts soit très balisée. Il faut que les banquiers centraux parlent et tracent ensemble le futur. La forward guidance, le pilotage des anticipations devra plus encore guider les esprits, pour qu’ils ne passent pas d’un extrême à l’autre, d’un krach à l’autre.
Pour cela, il faut renforcer la coopération des argentiers, avec la Chine cette fois, et la zone euro bien sûr. Ceci veut dire, en pratique, qu’il faut profiter de ces taux d’intérêt encore très bas pour continuer à faire changer ici les entreprises et plus encore à réformer les règles de fonctionnement des marchés, notamment de l’emploi. Ce sont ces réformes qu’il faut pour la croissance et la vraie reprise. Autrement on regrettera l’occasion manquée, et le risque de l’autre krach en sera accru.
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