Facebook, Tesla, GAFA… flux et reflux de confiance

Facebook vit une mauvaise passe, qui ne durera pas, souhaitons-le. On se vit entreprise adorée, avec un chef charismatique ; on se découvre aujourd’hui avoir donné ou vendu les coordonnées personnelles de millions de clients à des entreprises assez peu recommandables. Ces données auraient servi à faire passer le Brexit ou à faire élire Donald Trump. Tesla alterne succès spatiaux et problèmes terrestres, après avoir promis des milliards de bonus à son chef, quand montent des rumeurs sur son efficacité et ses cadences de production. Les GAFA entrent dans la valse des inquiétudes boursières et on se dit que Donald Trump en veut à Amazon, coupable selon lui de faire fermer des petits magasins, grâce à un régime fiscal favorable, à moins que son Président, Jeff Bezos n’ait acheté le Washington Post.

Dans tous ces cas, on voit à quel point ces entreprises mondiales peuvent passer du plus haut à nettement plus bas, et surtout très vite. Le Capitole n’a jamais été aussi grand, la Roche Tarpéienne jamais aussi proche. Pourquoi donc ?

Parce que le monde dans lequel nous vivons est celui de la communication, avec son économie bien particulière. Aujourd’hui, avec les réseaux, les succès sont fulgurants, écrasant les compétiteurs moins astucieux, moins réactifs, imaginatifs ou glamour. Assez vite, la part de marché grossit, se mondialise, se monopolise.

Et tout cela repose sur la confiance, confiance dans la technologie, dans les prouesses répétées, dans les messages humanistes et fraternels, dans le look du chef, assez vite devenue figure idéalisée, presque une idole. Et la valeur boursière gonfle : on achète les technologies, l’image, la confiance, sans compter.

Mais la confiance n’exclut pas le contrôle, une phrase attribuée à… Lénine, surtout quand tout repose sur elle ! Une anicroche est toujours possible, mais doit immédiatement être expliquée et corrigée. Pas deux ou trois de suite, et surtout sans explication ni correction. Les excuses ne suffisent pas, parce que la défiance s’en mêle. Et alors la bourse « découvre » que le titre est bien cher, le traitement fiscal favorable et surtout les vérifications internes lacunaires, et les externes absentes.

L’économie de communication dans laquelle nous sommes entrés est une économie de confiance, qui se renforce chaque jour par l’efficacité des procédures et par leur succès. Il s’agit d’être techniquement aussi efficace que dépourvu de naïveté. On ne peut faire confiance à qui signe «les yeux fermés », parce qu’on lui délègue cette confiance. Ceci, on s’en doute, est décisif dans l’économie de l’intangible qui est la nôtre, ce qui renvoie à la fiabilité des engagements, des procédures, des recrutements et des formations, et des vérifications, contrôles et certifications. Bref à la Responsabilité sociale de l’entreprise, vue sous un autre angle, puisqu’elle peut mettre l’entreprise en danger, et parfois la démocratie.

Les pertes boursières, le Brexit ou l’élection de Donald Trump montrent à quel point nous sommes dans une économie de la donnée, à condition de ne pas la donner ! Surveiller, stocker dans des endroits sûrs, détruire, interdire et protéger : voilà ce qui est obligatoire pour toutes les entreprises, grandes ou petites, qui ont des fichiers que nous alimentons. Bien sûr, on dira que c’est compliqué, bien cher, tatillon, que d’autres, dans d’autres pays, n’ont pas ces scrupules et ces pesanteurs. Mais c’est vrai que les données sont précieuses, parce qu’elles sont la valeur de l’entreprise, et qu’il faut donc investir pour les acquérir, les traiter et les protéger. C’est vrai aussi qu’une entreprise qui n’agit pas de même fausse la concurrence et doit être suivie, pour fonctionner comme les autres, dans le même réseau de confiance – et au niveau international, par des mesures de suivi et de contrôle de plus en plus voisines.

Ce qui se passe aujourd’hui dans certaines entreprises totémiques montre l’autre versant de la confiance : elle est extraordinaire quand on la gagne, dramatique quand on l’écorne. La leçon est décisive pour continuer à avancer et à réussir. Il faut faire confiance… à la confiance.

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Fondateur de Betbeze Conseil SAS, Professeur de Faculté en Sciences économiques, Jean-Paul Betbeze a été Chef Economiste du Crédit Lyonnais en 1989 puis du Crédit Agricole (et membre de son Comité exécutif) jusqu’en 2013. Ancien membre du Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre et de la Commission Economique de la Nation, il est membre du Cercle des économistes et Président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schumann. Auteur de nombreux ouvrages et rapports, il a rejoint le cabinet en avril 2013 en tant qu’Economic Advisor pour apporter son regard d’expert en analyse économique, conjoncturelle et financière.

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