Les green bonds – ces « obligations vertes » qui financent des projets ayant un impact favorable sur l’environnement – constituent un puissant levier d’action pour accélérer la transition écologique. Pourtant, si ces outils de financement connaissent aujourd’hui un succès croissant, leur impact environnemental est encore sujet à débat.
En 2017, les émissions de green bonds ont représenté 152,7 milliards de dollars. Soit… 60,3 milliards de plus qu’en 2016 ! Une augmentation des volumes qui en dit long sur le développement de ces obligations « vertes » dans le monde.
La croissance de ces émissions s’accompagne d’une diversification des profils d’émetteurs. Autrefois limité aux agences de développement, le cercle des émetteurs de green bonds s’élargit désormais aux banques, aux entreprises, aux collectivités et aux états. La Pologne avait ouvert le bal en fin d’année 2016, talonné par la France début 2017 qui a établi un record de taille, et très récemment, la Belgique avec une émission de 4,5 milliards.
Autre indice de montée en puissance : la diversification des monnaies, et donc la diversification géographique des émissions de green bonds. Si 45% des émissions sont encore concentrées sur 3 pays – France, Etats-Unis et Chine – d’autres pays jouent un rôle de plus en plus important sur le marché des green bonds. L’Asie notamment, qui cherche à encadrer les pratiques avec des initiatives régionales ASEAN et nationales comme les guidelines définis par le Ministère de l’environnement japonais.
Selon la théorie classique, l’investisseur fonde sa décision sur un arbitrage entre deux variables : le rendement et le risque (la volatilité pour une action). Dans le cas d’un green bond, comme pour tout produit « vert », l’investisseur ajoute une troisième dimension à son analyse: l’impact environnemental.
Pour simplifier les choses (de manière abusive certes), l’investisseur passe donc d’un monde en 2D à un monde en 3D. Il se retrouve ainsi face à deux questions:
Si ces deux questions font encore l’objet d’intenses débats, l’investisseur, quel que soit son type (individuel, private equity, institutionnel, etc.) doit s’interroger sur ces deux points afin de prendre une décision raisonnée.
Le besoin qui se présente, crucial, est donc de mesurer l’impact environnemental d’une obligation ou action verte. Comment être « sûr » que l’argent investi favorisera, d’une manière ou d’une autre, la transition écologique ?
La première étape est de mesurer l’impact total du projet ou de l’entreprise sur l’environnement. Par exemple, quelle quantité de gaz à effet de serre (« GES ») l’installation d’un champ d’éoliennes évitera-t-il d’émettre dans l’atmosphère ?
Dans certains cas, le plus simple est de mesurer la performance environnementale grâce à des estimations ex-ante des résultats. Pour reprendre le même exemple, quelle est la production électrique « verte » prévisionnelle pour une année type ?
La deuxième étape est de définir la part que représente le titre dans le financement global du projet. Par exemple, une obligation qui finance 20% d’un projet pourra s’attribuer 20% de l’impact de ce même projet.
Ces informations, lorsqu’elles sont fournies par l’émetteur et à condition qu’elles soient exhaustives et sincères, permettent aux investisseurs de mieux appréhender la dimension « bénéfice environnemental » de leur placement, de prendre une décision raisonnée et ainsi de reprendre ses responsabilités.
Quel impact additionnel pour les green bonds ?
Les green bonds font-ils baisser les émissions de gaz à effet de serre (GES) en donnant naissance à des projets durables qui, sinon, n’auraient jamais vu le jour ? Pas vraiment… La plupart des green bonds refinancent en réalité des projets/actifs existants à cours de financements. Une action verte peut donc avoir un impact positif en finançant un projet écologique, mais il ne s’agit pas à proprement parler d’impact environnemental additionnel. Les projets financés auraient de toute manière été financés…
La bonne nouvelle est que l’on observe un mouvement de fond vers davantage de transparence. Les investisseurs s’intéressent de plus en plus à l’impact des projets qu’ils financent et échangent avec les émetteurs.
En contrepartie, certains émetteurs se sont engagés à publier chaque année la liste des projets financés avec des informations sur leurs résultats et impacts environnementaux. Les émissions sont par ailleurs souvent accompagnées de revues externes. Il en existe deux types (largement simplifiées ici) :
Cette transparence représente un coût. Qui doit financer cela? L’émetteur ou le souscripteur ? Nous en revenons à la double préoccupation technique et stratégique de l’investisseur « vert ». Et c’est la question de l’opportunité des green bonds qui se pose .
Par ailleurs, les critères « vert » sont loin aujourd’hui de faire consensus. C’est même tout le contraire : la divergence dans les méthodologies employées pour évaluer le coté green crée le doute sur la crédibilité des analyses rendues. La vive polémique qui a accompagné l’émission d’un green bond par l’entreprise Repsol au printemps 2017 est symptomatique de ce manque d’alignement.
Au détriment des investisseurs – qui ne savent pas clairement si leur argent est utilisé à bon escient – et des green bonds eux-mêmes – qui pourraient se développer encore plus vite si leur caractère durable était plus facilement démontré.
Dans cet océan de questions et de débats, il existe cependant une certitude : mesurer l’impact environnemental des projets et publier une information sincère et exhaustive est une nécessité absolue pour le développement des green bonds comme de la finance verte en général.
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