Le changement climatique n’est plus un risque, c’est une réalité : notre atmosphère s’est déjà réchauffée de 1°C par rapport à l’ère préindustrielle. Nous savons aussi que les émissions d’aujourd’hui feront le climat de demain : quels que soient nos efforts désormais pour réduire nos émissions mondiales de gaz à effet de serre, les conséquences de nos actions sont déjà irréversibles.
Face à ces deux constats, le concept de « résilience » s’est progressivement imposé dans le discours et les actions des pouvoirs publics et des entreprises. Et pour cause : traditionnellement associé à des notions de risques majeurs, le terme de résilience semble a priori totalement approprié dans le contexte d’urgence climatique qui est le nôtre aujourd’hui. Mais que recouvre exactement ce concept et est-il réellement bien employé ?
Bien souvent, la « résilience » renvoie à l’idée d’une continuité avec le passé, à la capacité de perpétuer un état ou une situation. Or, ce sont justement nos modes de production et de consommation qui ont engendré et continuent d’alimenter les immenses défis climatiques qui se dressent devant nous. La notion de résilience doit donc aller bien au-delà de la simple idée de continuité, pour nous conduire à nous interroger sur notre système économique et sociétal – et à le réinventer. Faute de quoi, nous courrons le risque d’engager des actions dangereuses, à contre-sens des transformations que nous devrions collectivement mener.
C’est pourquoi nous proposons, dans le contexte de la publication par le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD) de son rapport Business Climate resilience- Thriving through the Transformation auquel nous avons contribué, une nouvelle définition de la résilience : une définition novatrice et inclusive, qui permette aux différentes parties-prenantes d’adopter un langage commun et d’entreprendre des actions climatiques efficaces, lisibles et pertinentes.
A l’origine, la résilience désigne la résistance d’un matériau aux chocs (le fait de « rebondir »), définition ensuite étendue à la capacité d’un corps, d’un organisme, d’une espèce, d’un système ou d’une structure à surmonter une altération de son environnement. A terme, la résilience permet un retour à l’état de départ.
Mais cette vision est insuffisante face à la nécessaire transformation des équilibres économiques, environnementaux et sociétaux qui nous permettront de combattre le réchauffement climatique. Le concept de résilience ne doit plus seulement être compris comme une résistance à un choc mais doit être appréhendé comme une lutte contre les causes qui ont provoqué ce choc.
Appliquée à une entreprise, la résilience se définit ainsi simultanément comme la continuité de ses activités face aux impacts du changement climatique ET dans la transformation de ses modèles vers une économie zéro émission nettes :
Figure 1: Le concept de résilience dans le contexte des entreprises et du changement climatique est la combinaison de deux approches indissociables. Crédit : WBCSD Business Climate Resilience – Thriving through the transformation
Assurer la permanence des activités économiques face aux crises :
L’entreprise met en place des mesures d’adaptation pour résister aux impacts physiques du changement climatique. Elle absorbe le choc, répare les dommages causés par lui et revient à l’état initial. La phase d’adaptation inclut diverses mesures : augmenter l’efficacité des procédés, construire des barrières, augmenter la redondance, ajouter des tampons et prédire les chocs futurs. Ces mesures visent à assurer la continuité des opérations de l’entreprise. C’est une approche préventive de la résilience.
Transformer les activités pour atténuer (voire éviter) les crises :
Des changements environnementaux, sociaux, culturels et économiques profonds et irréversibles sont en cours. Le Business-as-usual n’est plus une option viable. L’entreprise doit transformer son modèle et mettre en place des mesures au niveau stratégique : réorienter les efforts d’innovation, introduire plus de flexibilité dans les opérations, diversifier les activités et prendre des décisions radicales pour se diriger vers une économie bas carbone. C’est une approche proactive de la résilience.
A partir de ces deux axes (continuité + transformation), nous avons développé avec le WBCSD un outil pour aider les différentes parties-prenantes à s’engager concrètement sur la voie de la résilience :
Figure 2: Une boussole pour naviguer vers la résilience des organisations en réponse à l’urgence climatique. Crédit : WBCSD Business Climate Resilience – Thriving through the transformation
Cette « boussole » à trois branches permet d’orienter l’action des entreprises et des pouvoirs publics, qui s’engageront simultanément sur trois dimensions – atténuation, transformation, adaptation – présentées ci-dessous par ordre de priorité :
L’atténuation – c’est-à-dire la réduction des émissions de gaz à effet de serre – est un levier efficace et prioritaire pour transformer l’activité économique et favoriser la résilience des organisations. A deux conditions : que son niveau d’ambition soit fixé par la science climatique (e.g. Science-Based Targets Initiative) et que les organisations soient prêtes à prendre des décisions adaptées pour atteindre leurs objectifs. A ce titre, les organisations respectent la hiérarchie de décarbonisation (sobriété, efficacité, énergies renouvelables) développée par l’association Négawatt et évaluent leur contribution à la réduction des émissions en amont et en aval de leurs activités. L’atténuation permet par ailleurs, sur le long terme, de réduire les coûts de l’adaptation aux impacts du changement climatique.
La transformation des activités et du business model pour repenser sa valeur ajoutée pour la société et la biosphère est un autre levier prioritaire. La vitesse de décarbonation sans précédent que nous devons désormais adopter pour rester sous 1,5°C de réchauffement remet de plus en plus en question l’existence même de certaines activités. Evaluer sa contribution à la société et à la biosphère est une tâche complexe. L’utilisation des Objectifs de Développement Durable (ODD) tels que réorganisés par le Stockholm Resilience Center est une bonne porte d’entrée :
Figure 3: Intégration des 17 Objectifs de développement durable à travers la biosphère, la société et l’économie. Source: Stockholm Resilience Centre
Il convient enfin de penser la capacité de résistance de son activité aux conséquences du changement climatique. Les risques doivent être évalués au-delà des actifs qui sont sous le contrôle direct de l’organisation : à travers les opérations, la chaîne de valeur et les territoires. Les capacités d’adaptation sont par nature limitées – la réduction de nos émissions et la transformation de nos économies doivent rester les priorités.
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