Après un chemin législatif chaotique de plus de 4 ans, la loi sur le devoir de vigilance a été publiée au journal officiel le 28 mars 2017. Cette loi vise à renforcer la responsabilité sociale et environnementale des entreprises en rendant obligatoire la publication d’un « plan de vigilance » dans leurs rapports annuels. A travers cette nouvelle loi se confirme la tendance française à privilégier la voie du législateur pour renforcer la prise en compte des enjeux de RSE par les entreprises.
Un plan de vigilance décrit les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes et l’environnement. Cette nouvelle loi ne porte donc pas uniquement sur les droits de l’homme, bien qu’au regard de la complexité et de la sensibilité de ce sujet encore peu intuitif pour les entreprises, ce soit le plus couvert par les leaders d’opinion et la presse.
Plus précisément, le plan de vigilance doit décrire les mesures suivantes :
Même si cela n’a pas de « portée impérative », le législateur conseille d’élaborer le plan de vigilance en association avec les parties prenantes comme les salariés, fournisseurs, les sous-traitants mais aussi les ONG et les représentants de la société civile.
La loi concerne :
Environ 150 entreprises multinationales françaises au total, sociétés mères françaises mais aussi filiales françaises à l’étranger, sont concernées selon le gouvernement, et doivent publier annuellement un Plan de vigilance.
La loi entre en vigueur dès maintenant et le plan de vigilance doit être établi dès 2017. Le compte-rendu sur la mise en œuvre effective du plan n’interviendra cependant qu’à compter du rapport portant sur le premier exercice ouvert après la publication de la loi. Ce qui signifie 2019 sur l’exercice 2018, pour les entreprises dont l’exercice comptable est ouvert à partir du 1er janvier 2017.
Le plan de vigilance doit porter sur :
L’extension de l’obligation de vigilance et de transparence à la chaine d’approvisionnement et de sous–traitance est une des évolutions les plus marquées par rapport aux autres exigences, notamment en matière de reporting RSE, l’article 225 de la loi Grenelle II ne demandant qu’une information qualitative sur les pratiques en place au sein des entités juridiques des groupes.
Les victimes, associations et/ou syndicats auront la possibilité de saisir le juge pour faire respecter l’obligation de publication et de mise en œuvre d’un plan de vigilance.
Selon les observations formulées par le gouvernement sur le texte de loi : « Le défaut de vigilance ne pourra être caractérisé que par une cartographie manifestement insuffisante des risques et l’absence de respect des procédures internes de contrôle que la société aura elle-même décidées dans le cadre du plan ».
Dans le cas d’une faute commise par un sous-traitant et entraînant un dommage, la responsabilité de la société ne pourra être engagée « que s’il est démontré qu’elle n’a pas respecté les obligations découlant de la loi et que cette méconnaissance a un lien de causalité direct avec le dommage créé ».
Les amendes civiles prévues par le texte initial sont cependant supprimées du texte définitif, conformément à la décision rendue par le Conseil constitutionnel.
On assiste donc bien à un recentrage progressif de la RSE « à la française » autour du paradigme de la gestion des risques : si la création de valeur partagée reste un cap stratégique fédérateur pour les entreprises, notamment au travers du cadre donné par les Objectifs de Développement Durable de l’ONU, la priorité à court terme est bien d’identifier et de gérer les impacts négatifs de l’entreprise sur ses parties prenantes, dans une démarche d’amélioration continue. Et de poursuivre ainsi sur un socle plus solide, l’indispensable chemin de transformation des modèles économiques dans une perspective de durabilité.
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