Moral économique et élection présidentielle

L’économie devient-elle immunisée aux discours politiques ? C’est la question du moment. Partout en effet : radio, télévision, journaux et réseaux sociaux, sans compter toutes les discussions que nous avons en permanence, nous vivons l’élection présidentielle. Et ce n’est pas fini : les questions politiques qui avaient commencé avec le Brexit, continué avec le feuilleton présidentiel américain, avant que ne commencent les Primaires de droite et du centre, puis celles de gauche, vont évidemment se poursuivre pendant les deux tours de l’élection présidentielle, en attendant ceux des élections législatives ! Quelle série ! Comment allons-nous intégrer tous ces débats et tous ces chocs, dans nos choix économiques ?

Plutôt bien, nous répond l’Insee. En mars 2017, le climat des affaires s’infléchit à peine, passant de 105 en février à 104, son niveau de janvier. En fait, l’amélioration se poursuit depuis décembre 2016. Fait plus important, l’indicateur synthétique atteint ainsi quatre points au-dessus de sa moyenne de long terme (100, depuis 1995). Le point bas a été atteint en 2009, à 70, avant de remonter, notamment pour le commerce de détail et pour les services. Le vrai point faible est celui de l’industrie manufacturière, qui perd trois points entre février 2017 (à 107) et mars (à 104).

De son côté, en mars 2017, la confiance de ménages reste à 100, comme en janvier et février 2017, au-dessus des 99 de décembre. L’indice de confiance rejoint ainsi sa moyenne de longue période, calculée entre janvier 1987 et décembre 2016. Il est ainsi graduellement remonté depuis son point bas à 80, début 2013. Cette stabilisation psychologique coïncide avec un ralentissement du pouvoir d’achat en fin d’année 2016 et avec l’accélération récente dans les services : immobilier, restauration, services aux ménages.

Ainsi, on pourrait dire que la longue période politique en cours n’affecte pas significativement la confiance des ménages français ou le climat des affaires ! Les deux indices retrouvent leurs niveaux de longue période, à 100 ou au-dessus. Comment comprendre ?  Voici six explications :

  • Mithridatisation : les ménages et les entreprises écoutent les messages et y sont de moins en moins sensibles. Pas blasés, mais presque.
  • L’essentiel est ailleurs : les Etats-Unis et l’Allemagne vont mieux, et c’est ce qui compte, sans compter cette Chine qui continue d’avancer.
  • La reprise mondiale est en cours, élections ou non. Le pire est passé et nous sommes embarqués sur un nouveau sentier de croissance, certes plus faible, mais peut-être aussi plus stable.
  • Tout dépend des banques centrales : la Banque centrale américaine va augmenter ses taux de façon à calmer les craintes d’inflation et la banque centrale européenne va jouer les prolongations avant d’augmenter les siens.
  • Attendre et voir : cette « moyenne » statistique est une position d’attente, un rapport de forces contradictoires qui peut être instable en cas de bonne ou de mauvaise surprise. Des rebonds sont donc possibles.
  • Suivons la bourse : la bourse américaine est en hausse continue depuis l’élection de Donald Trump (+16%), réveillant les autres. Le Cac 40 est à 5100, contre 4100 fin juin 2016 !

Au fond, les indices techniques de moral des entreprises et des ménages ne sont pas beaucoup plus faciles à interpréter que les sondages électoraux !

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Fondateur de Betbeze Conseil SAS, Professeur de Faculté en Sciences économiques, Jean-Paul Betbeze a été Chef Economiste du Crédit Lyonnais en 1989 puis du Crédit Agricole (et membre de son Comité exécutif) jusqu’en 2013. Ancien membre du Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre et de la Commission Economique de la Nation, il est membre du Cercle des économistes et Président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schumann. Auteur de nombreux ouvrages et rapports, il a rejoint le cabinet en avril 2013 en tant qu’Economic Advisor pour apporter son regard d’expert en analyse économique, conjoncturelle et financière.

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Tags: Economie

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