Article co-écrit avec Wilfrid Biamou, Senior manager, et Kevin Taillardat, Manager.

Les organismes Hlm appréhendent déjà depuis plusieurs décennies les principes du développement durable dans leurs stratégies et dans leurs actions quotidiennes. Pour autant, les bouleversements sociétaux (nouveaux besoins, évolution des usages,…), environnementaux (réchauffement climatique, réduction de la biodiversité,…) et économiques (hausse du prix des énergies, des matériaux,…) que nous vivons depuis quelques années, couplés à des évolutions réglementaires d’envergure (Loi Climat et Résilience, RE 2020, refonte de la méthode de calcul des DPE, Décret Tertiaire, Loi AGEC, …) conduisent à positionner le développement durable comme un inducteur majeur des stratégies d’entreprise et, en particulier,  des stratégies patrimoniales.

 

Le Plan Stratégique de Patrimoine (PSP) :

Les premiers PSP étaient essentiellement centrés sur des dimensions techniques et économiques.  Sous l’impulsion de la seconde vague de Conventions d’Utilité Sociale, les nouvelles générations de PSP ont ouvert le champ à l’appréhension de nouveaux enjeux sociétaux (vieillissement, fragilisation des ménages), environnementaux (performance énergétique) et à des approches plus collaboratives impliquant de nouvelles parties prenantes (habitants, collectivités).

Pour autant, les enjeux du Développement Durable sont encore souvent abordés dans ces plans au travers de la seule dimension énergétique. Celle-ci étant réduite à un axe d’analyse à part entière, et non comprise comme un point d’entrée structurant l’ensemble des analyses.

 

Un environnement propice et des exigences à la mise en place d’un PSP Durable

Que ce soit pour répondre :

  • A des exigences réglementaires nationales ayant déjà fixées des contraintes pour l’activité des organismes Hlm (ex : interdiction de location et de vente des logements les plus énergivores),
  • A des orientations politiques locales parfois plus exigeantes que ces réglementations,
  • A l’évolution des besoins et des usages des locataires et demandeurs de logements (mobilité, télétravail,…),
  • A la réorientation des flux financiers vers des activités vertes (taxonomie européenne),
    tout converge vers la nécessité de réinterroger les approches traditionnelles d’élaboration des PSP, approches qui ont atteint leur point limite.

 

Stratégie patrimoniale durable : l’intégration de nouveaux principes directeurs

La prise en compte de la composante développement durable n’est pas de fait sans conséquence.

La mise en place d’une stratégie patrimoniale durable entraîne nécessairement un changement de prisme concernant l’horizon de temps à appréhender. Les réflexions stratégiques sur l’évolution et l’adaptation du patrimoine doivent désormais s’opérer sur une durée de vie plus longue. Ce facteur temps est nécessaire pour mieux appréhender dans la durée les objectifs exigeants de la réglementation et ses impacts sur le patrimoine, les stratégies d’intervention (décisions d’exploitation et d’investissement) à réaliser et à lier aux enjeux environnementaux, territoriaux et sociaux.

Dans cette logique de stratégie de long terme, les coûts d’investissement estimés et induits par la  composante développement durable doivent être séquencés sur plusieurs périodes (court, moyen et long terme) pour :

  • Trouver un juste équilibre dans l’anticipation, l’adaptation en continu des moyens financiers et humains à mobiliser,
  • S’assurer que les décisions d’exploitation et d’investissement sont prises à la bonne échelle et que le suivi des réalisations sous la forme de plans d’actions s’effectue plus aisément.

 

Des évolutions méthodologiques concrètes

L’organisation de la démarche PSP Durable autour des trois phases structurantes du diagnostic stratégique du patrimoine, de la définition des orientations et des plans d’actions et enfin la mesure de la soutenabilité (économique et opérationnelle) nous parait toujours adaptée.

Pour autant, le contenu méthodologique de celles-ci doit évoluer avec :

  • Un diagnostic multidimensionnel irrigué par des critères développement durable sur l’ensemble des champs d’analyses (marché, attractivité, occupation sociale, technique et économique). Ces indicateurs sont pensés comme des outils d’évaluation à l’instant « T » mais également comme des éléments de mesure des effets des futures actions mises en œuvre,
  • La formalisation d’une feuille de route durable à long terme fixant un cadre d’ambition (ex : atteinte d’une neutralité carbone à horizon 40 ans) ayant un impact sur les différentes stratégies d’intervention (aménagement, développement, intervention sur le patrimoine existant, …) et leur déclinaison opérationnelle à travers des plans d’actions à court et moyen terme,
  • La mesure des soutenabilités financières et opérationnelles de ce PSP Durable.

Le passage d’un PSP « classique » à un PSP Durable

La mise en place dans les meilleures conditions d’un PSP Durable suppose, par ailleurs, une forme de maturité dans :

  • La capacité de l’organisme à arrêter des décisions d’exploitation et d’investissement à partir d’une analyse multidimensionnelle (marché, développement durable, attractivité, occupation sociale, technique et économique),
  • Une capacité à collecter des données sur les caractéristiques du patrimoine, de son environnement, des besoins et usages des locataires, et de les actualiser à période régulière. En ce sens, le recours à des outils numériques (GMAO, PSP numérique, BIM gestion, …) peut être un levier puissant pour faciliter et fiabiliser cette connaissance.

 

Les bénéfices de la démarche PSP Durable :

La mise en place d’un PSP Durable permet d’escompter des bénéfices concrets de différentes natures :

  • Une approche différenciante permettant d’améliorer l’image RSE(G) de l’entreprise au bénéfice d’une meilleure fidélisation des locataires, d’une meilleure relation de confiance avec les partenaires, d’une attractivité plus forte de la marque employeur,
  • Une meilleure maîtrise des charges en faveur du pouvoir d’achat des locataires,
  • Un accès facilité à des sources de financement dédiées aux activités durables (taxonomie européenne),
  • Une sécurisation des coûts de production grâce aux actions de revalorisation, de réemploi des matériaux et de recherche de sources d’approvisionnement locales, biosourcées, …