Un seul vœu : faire passer de 1,25% à 1,5% la croissance potentielle française

Voilà un seul vœu pour 2018 : c’est le plus important, donc pas le plus facile… On s’en doute ! Et pourtant, produire plus sur moyenne période, c’est réduire le chômage et aller vers le plein emploi. C’est aussi réduire le déficit budgétaire et donc, dans le temps, la dette publique. Mais comment faire, si c’est si prometteur ? Pas simple, car il faut investir bien plus et surtout exporter beaucoup plus, jusqu’à obtenir un excédent des biens et services ! On s’en doute : nous n’y sommes pas vraiment, mais au moins les choses s’améliorent peu à peu. Il faut donc continuer et accélérer, en expliquant… qu’il faut surtout former !

1,25% d’abord : la croissance potentielle est l’indicateur le plus important d’un pays, même si on n’en parle pas beaucoup. On n’en parle pas beaucoup parce qu’elle ne se voit pas : c’est la hausse du volume de production (en biens et services) que peut atteindre de manière durable l’économie française qui utilise à plein ses capacités, et sans inflation.

2,2% – 1,25% = 0,95 %, disons 1%. C’est l’output gap actuel, ou écart de production. Il donne le pouls de l’économie. C’est l’écart entre la croissance telle qu’elle est mesurée régulièrement par l’Insee (2,2% actuellement), et ce 1,25% de croissance potentielle, telle qu’il est calculé de loin en loin. Cet écart reflète la position de l’économie dans le cycle, autrement dit la vitesse de l’économie par rapport à ce qu’elle pourrait faire « au mieux sans inflation » dans la durée.

Donc aujourd’hui, la croissance française dépasserait son potentiel calculé ! Génial ! Aujourd’hui, au troisième trimestre, mais pas hier, et on verra demain. Tout n’est donc pas au mieux, d’abord parce que la croissance passée a été inférieure à 1,25% pendant plusieurs années, ensuite parce que nos capacités actuelles ne sont pas employées à plein, notamment pour l’emploi. La reprise en cours permet ainsi de réduire le « manque à produire accumulé », cet output gap qui s’est creusé depuis 2008. Il était au total de 1,5% du PIB en 2016, de 1% environ en 2017 et va vers 0% en 2020. C’est à partir de ce moment, en continuant sa croissance, que la France augmentera peu à peu son potentiel. Mais comment donc ?

Une leçon alors : les calculs récents, pour la période 2017-2020, nous disent que la croissance potentielle à 1,25% s’explique pour moitié par les facteurs de production (travail et capital) et pour moitié par la productivité, autrement dit par la bonne combinaison de ces deux facteurs. Le facteur travail (nombre d’heures travaillées) en explique entre 0,1 et 0,2%. Le facteur capital contribue pour 0,4 à 0,5% et le solde, la Productivité, pour 0,6 à 0,7%. Investir, employer et surtout former, voici donc, dans cet ordre, les trois ingrédients de notre croissance potentielle.

Un guide donc : investir plus, réformer davantage, former bien mieux. Investir plus : l’investissement productif se réveille enfin, grâce aux baisses des charges et de la fiscalité. Réformer davantage, c’est améliorer le fonctionnement du marché du travail, simplifier le droit du travail, créer un meilleur dialogue social, sachant que la hausse de population active dépend à moyen terme des règles du système de retraite et, à court terme, de l’activisme de pôle emploi. Former bien mieux, enfin et surtout, passe par une meilleure efficacité de tous les systèmes d’éducation, plus l’apprentissage et surtout la formation permanente.

On aura reconnu dans ce qui se passe actuellement (CICE, baisse de l’impôt, simplifications fiscales diverses, ordonnances, refonte de l’apprentissage…) les ingrédients d’une hausse de la croissance potentielle. Mais tout ceci prend du temps, d’autant plus si on n’explique pas ! Mieux vaut expliquer ce vœu qu’on cherche à réaliser, puisqu’il dépend de nous ! Bon 1,5% de croissance potentielle, donc !

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Fondateur de Betbeze Conseil SAS, Professeur de Faculté en Sciences économiques, Jean-Paul Betbeze a été Chef Economiste du Crédit Lyonnais en 1989 puis du Crédit Agricole (et membre de son Comité exécutif) jusqu’en 2013. Ancien membre du Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre et de la Commission Economique de la Nation, il est membre du Cercle des économistes et Président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schumann. Auteur de nombreux ouvrages et rapports, il a rejoint le cabinet en avril 2013 en tant qu’Economic Advisor pour apporter son regard d’expert en analyse économique, conjoncturelle et financière.

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