Article co-écrit avec Constance von Briskorn, Consultante Senior, Risk Advisory
Les effets négatifs du secteur du tourisme et de l’hôtellerie sur les milieux naturels sont, malheureusement, largement connus : dégradation et fragmentation des espaces naturels, pollutions diverses, perturbation pour la faune, prélèvements excessifs de ressources naturelles… Ce dont on parle un peu moins en revanche, c’est de la manière dont le secteur peut contribuer positivement à la préservation de l’environnement : bien gérés, le tourisme et l’hôtellerie peuvent être des atouts précieux pour la biodiversité. Le secteur dispose en effet de deux leviers clés pour contribuer de façon directe et indirecte à sa conservation.
Le secteur a la capacité de faire des paysages et des écosystèmes des « produits » qui font venir des visiteurs, génèrent des revenus, créent des emplois, attirent des investisseurs, et alimentent ainsi toute une économie. Si dans certaines formes de mise en tourisme, la richesse et la diversité des milieux disparaissent dans un marketing standardisé (par exemple, le modèle « playa y sol » espagnol), de nombreux segments du secteur (éco-tourisme mais également luxe) s’appuient sur elles pour construire leur proposition de valeur : les hôtels Aman promettent ainsi au visiteur de séjourner dans les plus beaux endroits du monde.
En ce sens, à la différence d’autres secteurs, le tourisme et l’hôtellerie n’ont pas besoin de convertir ou de détruire à grande échelle des milieux naturels pour fonctionner : ils reposent sur des activités qui, si elles sont loin d’être sans impact, peuvent structurellement composer avec la biodiversité et fonctionner en synergie avec elle[1]: d’où l’importance, dans tout projet de développement touristique et hôtelier, de conduire en amont des études d’impact environnemental approfondies et de mettre en œuvre de façon stricte la séquence éviter-réduire-compenser.
Par ailleurs, parce qu’ils attirent des flux importants dans des zones riches en biodiversité, le tourisme et l’hôtellerie favorisent la prise de conscience chez les visiteurs de l’importance et de la fragilité de la biodiversité. Ils facilitent également parmi les populations locales une adhésion plus grande à la protection de l’environnement, par les emplois et les richesses qu’ils créent.
Les droits d’entrée payés par les touristes quand ils visitent des aires protégées et les diverses dépenses qu’ils effectuent à l’intérieur ou à proximité (logement, éventuellement permis de chasse ou de pêche, etc.) contribuent de façon très importante aux ressources financières de ces espaces et sont dans certains pays le fondement de stratégies conjointes de développement économique et de conservation de la nature.
Au vu des besoins considérables et croissants en financements privés pour la conservation des écosystèmes (estimés à 220-300 milliards de dollars US par an[2]), on peut penser que ces modèles économiques, qui commencent à attirer l’attention de certaines catégories d’investisseurs, sont appelés à jouer un rôle croissant : c’est l’opportunité pour le secteur de bâtir sur ces tendances de fond et de maximiser leur contribution.
En 2016, le marché de l’investissement à impact dans le domaine de la conservation de la nature s’élevait à 8,2 milliards de dollars US, soit une croissance de 62% par rapport à 2014. Dans différents pays, des plateformes ont ainsi été créées pour encourager les investisseurs à impact à investir dans l’écotourisme et développer les capacités d’accueil.
[1] Source : Biodiv’2050. Entreprises et biodiversité : risques et opportunités. CDC Biodiversité. Juillet 2015
[2] Source : Conservation Finance : Moving beyond donor funding toward an investor-driven approach. Crédit Suisse, WWF, McKinsey&Company. 2014
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