Pour voir plus loin, rien de mieux a priori que les marchés financiers, sauf quand ils envoient des signaux contradictoires. Mais peuvent-ils faire autrement, dans les temps qui sont les nôtres ?

États-Unis : le prix du pétrole s’envole et dépasse 70$ le baril. Mais cette forte montée est plus liée aux interrogations géopolitiques qu’à une accélération de la reprise, après la décision de Donald Trump de sortir de l’accord iranien. Pendant ce temps, le dollar baisse un peu par rapport à l’euro, alors qu’il est censé être la monnaie de réserve du monde en cas de tension. Et les taux longs américains repartent vers 3%, en liaison avec la montée attendue des prix, donc des taux courts. Plus de tensions géopolitiques, plus de risques d’inflation et plus de hausse des taux dans une économie américaine qui tourne à pleine capacité : elle peut surprendre, en continuant ou bien fléchir. Qui va donc gagner ? La croissance encore, ou bien l’inquiétude ?

France : l’Insee annonce à la fois, le 9 mai 2018, qu’en mars 2018, la production est quasi stable dans l’industrie manufacturière (+0,1 %, après −0,5 % en février), mais ceci après une nette baisse au premier trimestre (-1,8%) et une hausse de 2% en 2017 ! L’activité industrielle manufacturière subit des chocs, notamment en fonction des prix de l’énergie, qui pèsent sur le raffinage et surtout sur la fabrication d’automobiles. Par différence, la progression des « autres produits industriels », qui pèse pour la moitié de l’industrie, avance de manière plus régulière. De manière générale, l’activité industrielle est plus exposée à la concurrence et aux chocs que les services, par construction plus lissés. Alors, qui va gagner, de la reprise qui se poursuit en France, ou de l’inquiétude qui pointe ?

Les exemples abondent, non seulement des interrogations des marchés financiers sur le futur, mais plus encore de leurs contradictions entre poursuite de la reprise en France et en zone euro, contre fragilisation aux Etats-Unis et ailleurs. Comment faire ?

Avancer. Il est difficile à un responsable de trop reconnaître que le futur est obscur ou qu’il ne sait pas trop, mais il est là pour avancer. C’est son meilleur choix. Il ne sert à rien de décrire des scénarios et d’affecter à chaque une probabilité, car l’histoire trouvera toujours une autre voie et il est sûr que le scénario hybride qui aura la plus forte espérance mathématique ne se produira pas. Il faut donc avancer, avec en tête, par exemple, deux autres années de croissance américaine avant la récession. Elle pèsera ici d’autant plus fortement que les taux seront à peine positifs en zone euro et l’endettement privé plus public est toujours en hausse. À 130,2 % du PIB, le ratio français de dette privée devient en effet le plus élevé des grands pays de la zone euro. Le rythme des réformes actuellement en cours en France est donc trop lent pour permettre de résister à un retournement.

Ceci implique que le renforcement obligatoire des entreprises par les marges, la formation et surtout la « raison d’être » de l’entreprise est décisif dans cette étrange sortie de crise, qui est en fait une entrée dans un nouveau monde. Avenir de chaque entreprise plus compliqué certes, donc à débroussailler et aussi à consolider par l’image de marque, la culture d’entreprise et les réseaux de clients ! Investir dans les réseaux de clients, de testeurs, de fournisseurs, de chercheurs, de soutiens de toute sorte, pour avancer et tâter le futur, est de plus en plus décisif. Il s’agit de consolider les choix de chacun et de créer en même temps les nécessaires appuis à l’entreprise. Voir plus loin dans un monde plus obscur ? En étant de moins en moins seuls !