Mettre en place une nouvelle politique tarifaire, prendre la décision de créer une succursale dans une autre région, lancer un nouveau produit, racheter un concurrent ou encore s’internationaliser sont des décisions qui ne se prennent pas à la légère. Le développement est une affaire sérieuse qui ne doit rien laisser au hasard. Les Conseils d’administration et les directions opérationnelles le savent bien, puisqu’elles n’hésitent pas à s’entourer de nombreux conseils extérieurs qui présentent l’avantage, en plus de leurs compétences particulières, d’apporter un recul bienvenu.

Les économistes portent un regard complémentaire à celui des stratèges d’entreprises et autres consultants. Ils mettent à la disposition des dirigeants un certain nombre de concepts et d’outils leur permettant de réfléchir différemment à des questions stratégiques, autour d’un cadre d’analyse rigoureux permettant de dessiner des préconisations fondées.

L’analyse économique : au-delà du financier

Les études de marché que souhaitent analyser les entrepreneurs avant de se lancer dans un projet, représentent la partie la plus connue de ce métier. À l’heure du Big data et du nombre toujours plus grand de bases de données accessibles, les économistes affûtent leurs analyses en croisant ces sources avec divers concepts économiques. Car il ne s’agit pas seulement d’analyser des chiffres. L’analyse économique étudie une opération stratégique dans sa globalité afin de bien en saisir tous les enjeux, y compris l’identification d’éventuels dommages collatéraux.

Exemple d’une intervention dans le cadre d’une opération de lancement de produit : un fabricant de HIFI décide de lancer un produit haut de gamme en accordant la primeur à un grand magasin. La question est posée de savoir si ce fabricant a intérêt ou pas à accéder à la demande d’autres magasins partenaires souhaitant aussi commercialiser le produit. Pas si simple. Un gros investissement a été réalisé par le grand magasin qui offre à ses clients la possibilité d’utiliser un salon d’écoute luxueux afin de leur permettre de bien juger la qualité du produit.

Cela entraîne logiquement une répercussion sur le prix. Après étude, une exclusivité territoriale est octroyée au grand magasin afin de lui permettre de rentabiliser ses investissements. En effet, il serait problématique que les commerces alentour vendent le produit à un prix plus bas (puisque n’ayant pas investi dans un salon d‘écoute), tout en bénéficiant de l’investissement du premier magasin : les clients potentiels risqueraient d’aller tester le matériel dans les conditions optimales, puis d’aller ensuite l’acheter, moins cher, dans un autre commerce alentour.

Le périmètre de cette exclusivité territoriale est la deuxième question posée… pour des raisons financières (le fabricant veut évidemment booster ses ventes via la commercialisation dans de multiples points de vente), mais aussi pour des raisons de droit de la concurrence. Évincer ses concurrents est interdit ; il faut donc justifier l’exclusivité territoriale et sa délimitation, afin de montrer qu’elle est bien calibrée et nécessaire.

L’un des grands intérêts des expertises économiques pour les entreprises est qu’elles étudient les situations dans leur globalité et pas seulement sous l’angle financier. La dimension des risques, de plus en plus importante, est également prise en compte. Sur ce terrain, la science de l’économétrie est d’un grand apport.

L’économétrie : voyage vers le futur

L’économétrie permet d’exploiter les données du passé afin d’expliquer leurs déterminants, ce qui ensuite peut être utilisé pour une modélisation du comportement des différents acteurs. Ainsi cette science permet-elle la gageure de reconstituer un marché inexistant dans la réalité, mais qui pourrait exister dans un autre contexte. Très utile, et de plus en plus utilisée dans le cadre des évaluations financières d’un préjudice, notamment.

Exemple d’une intervention dans le cadre d’un conflit entre une entreprise ayant participé à un cartel et l’un de ses clients. Le second reproche au premier de ne pas avoir respecté les règles de concurrence et de lui avoir fait payer un prix plus élevé. L’économétrie va permettre de recréer le monde économique de l’entreprise plaignante, tel qu’il aurait été si son fournisseur n’avait pas participé à un cartel. Des variables multiples sont prises en compte et plusieurs scénarios sont créés. Le préjudice financier est alors évalué de la façon la plus réaliste possible.

Des exemples d’entreprises (ou d’établissements financiers sollicités pour un projet) faisant appel à l’économétrie en amont d’un projet, afin de tester les risques, sont également nombreux. Les décisions stratégiques des dirigeants ont nécessairement des impacts sur le plan juridique, fiscal, social et concurrentiel… Ignorer les conséquences de celles-ci – aussi bonnes soient-elles sur le plan purement financier – peut générer des risques pouvant in fine coûter très cher.

L’approche de l’expert économique, dans un contexte « d’anticipation », est de mesurer les chances de succès de l’opération envisagée et d’en évaluer les risques. Lors de projets de fusion, par exemple, la prise en compte du risque concurrence, en particulier, est primordiale. La mobilisation d’une équipe d’économistes en amont permet d’anticiper les problèmes susceptibles d’être identifiés par les autorités de concurrence et de mesurer les conséquences financières sur le deal initial des solutions envisageables.

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