Patatras ! Jerome Powell est au faîte de sa carrière : il vient, le 2 février, de succéder à Janet Yellen… et le Dow Jones perd 2,5% ! En même temps, les taux longs à 10 ans passent de 2,79% à 2,84% ! Certes, les marchés financiers peuvent regretter Janet Yellen, mais pas au point quand même de s’infliger de telles pertes. Que s’est-il donc passé ?

Eh bien, la cocotte de la reprise économique américaine continue de bouillir. Vendredi 2 février : 200 000 nouveaux emplois sont remplis en janvier aux Etats-Unis. On en attendait 180 000. Certes, le  taux de chômage reste à 4,1%, mais voilà une hausse du salaire horaire à +2,9% en janvier sur un an, après +2,7% en décembre. C’est le déclic : le réveil possible de l’inflation salariale !

Le plein emploi s’est en effet installé depuis des mois et butte sur l’emploi disponible. En même temps, Donald Trump pousse les feux avec la baisse des impôts sur les entreprises et sur les ménages. Les entreprises augmentent alors salaires et bonus, les ménages dépensent plus que jamais et épargnent moins que jamais. La croissance va vers 3 ou 3,5%, poussée surtout par la consommation. Et c’est alors que la Fed d’Atlanta, avec une autre approche, annonce même que la croissance serait plutôt de 5,4% ! Ce qui l’a conduit à proposer des taux courts non pas à 1,2%, mais à 3,5% !! Un autre monde.

Et Donald Trump vient d’annoncer, lors de son discours sur l’Etat de l’Union, qu’il entend investir plus en infrastructures, routes et ponts. 1 500 milliards de dollars. Il a raison : s’il veut attirer des entreprises aux Etats-Unis et faire investir plus celles qui y sont, il faut offrir non seulement de la flexibilité du travail, c’est le cas, moins d’impôt, c’est fait, plus de compétences, c’est tout le problème, et de meilleures infrastructures, ce n’est pas encore la réalité.

Dans ces conditions, la poussée vers la demande d’emplois ne peut que monter, au moment même où Donald Trump limite l’immigration ! Les salaires ne pourront que monter, buttant non seulement sur la main d’œuvre disponible mais aussi en bonne santé et plus encore compétente. Alors : plus d’importations ou plus de robots ?

En attendant, Jerome Powell devra augmenter les taux, trois fois en 2018, ce qui calme le problème, sans le guérir. Il devra surtout parler pour calmer les taux longs et éviter une spirale inflation-hausse des taux qui mettrait l’expansion en péril.

Sans être vexant, il faudra qu’il soit prudent, car la reprise américaine est déjà âgée : 9 ans, et est en passe de devenir la plus longue de l’histoire américaine, sauf s’il la tue ! Les marchés vont donc attendre la forward guidance « à la Powell », ce discours si balancé d’attente, entre inflation à 2% (pas encore) et plein-emploi (moins encore), où excellait Janet Yellen.

Pauvre Jerome Powell : il n’est pas spécialiste de l’emploi (comme Janet, qui vient d’être embauchée à la Brookings Institution !), mais des marchés financiers. Il comprend donc ce qui leur arrive et ce qu’il lui arrive. Leur mentir ? Pas possible. Leur demander d’attendre que les employés (nouveaux et anciens) se forment et augmentent leur productivité… nous ne sommes pas en France. Le risque est donc que les bulles actions se dégonflent, et que la croissance s’apaise, au mieux. Donald Trump risque de ne pas aimer, mais il avait bien prévenu, quand il était en campagne, que la Fed (Janet Yellen) soutenait artificiellement l’économie (Barack Obama). Ceci risque donc de s’arrêter. Souhaitons ne pas en avoir de trop forts ricochets ici. Pauvre Jerome Powell !

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