Les conclusions du groupe de travail sur les informations financières liées au climat (TCFD, pour Task Force on Climate-related Financial Disclosures), auquel j’ai eu le grand plaisir de participer depuis un an et demi, viennent d’être présentées aux chefs d’état du G20 à Hambourg et sont mentionnées dans leur communiqué sur le changement climatique.

Le rapport, conçu sous l’égide du Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board – FSB), propose aux entreprises de mesurer l’impact des risques climatiques sur leurs activités, à travers 11 éléments de reporting. Ces informations sont à intégrer au sein des rapports financiers des sociétés et visent à aider les acteurs du monde financier (banques, assurances, propriétaires et gestionnaires d’actifs) à mieux évaluer dans quelle mesure les entreprises avec lesquelles ils sont en relation sont préparées aux évolutions liées au changement climatique. Une adoption de ces « standards » par un grand nombre d’acteurs « aidera à réduire le risque que les ajustements du marché vis-à-vis des changements climatiques soient incomplets, tardifs et potentiellement déstabilisants » (Mark Carney, président du FSB et patron de la Royal Bank of England).

Ce nouveau cadre de reporting s’inscrit dans la lignée de l’Accord de Paris de décembre 2015 et de la prise de conscience par le monde financier des risques liés au climat. C’est trois mois avant cet accord, en septembre 2015, que Mark Carney prononce son célèbre discours de la « tragédie de l’horizon », mettant en parallèle le cataclysme de la crise des subprimes, dont le monde se remettait à peine, et les risques liés au changement climatique. L’enjeu perçu alors était celui d’une déstabilisation monétaire mondiale. Il était devenu évident que, pour anticiper et éviter cette crise, des mesures importantes devaient être prises, non seulement par le monde politique mais aussi par les acteurs financiers.

Le constat de départ de la TCFD était que pas moins de 400 initiatives de reporting sur les données de développement durable avaient historiquement été conduites. Et que le rapport du TCFD ne devait surtout pas devenir la 401ème… Il est en effet unique. Et ce pour deux raisons principales. La première est que les recommandations formulées sont, pour la première fois, issues d’un travail approfondi et d’un consensus fort entre le secteur financier d’une part, et les entreprises ayant un fort impact environnemental d’autre part. La deuxième est que les 11 éléments de reporting préconisés ont vocation à être intégrés dans le rapport financier des entreprises, et non dans un rapport Développement Durable distinct, comme c’était le cas dans les référentiels précédents.

Retenons également la forte implication du Président de la Task Force, Michael Bloomberg (dont on connait l’engagement sur le sujet du changement climatique), qui adresse un signal fort : le business américain s’est emparé du sujet, un sujet qui était jusque-là resté essentiellement européen, et même français. La France, avec son cadre législatif et réglementaire (Grenelle 2, bilans GES, reporting RSE, article 173 de la loi de transition énergétique, y compris obligation pour les entreprises françaises de publier l’information dans leur rapport de gestion) a en effet pris une longueur d’avance en matière de transparence et de reporting climatiques.

La mise en œuvre des recommandations du TCFD n’aura pas les mêmes implications aux Etats-Unis et en Europe.  En Europe, comme l’a souligné à juste titre le MEDEF, « les utilisateurs primaires des informations financières liées au climat ne seront pas les investisseurs, mais les banques. Le bilan global des banques de la zone euro est d’environ 270% du PIB alors qu’il ne représente que 70% du PIB des États-Unis. ». Les enjeux sont donc très différents en Europe, où le financement est largement bancaire, et aux Etats-Unis, où l’économie est financée par les marchés de capitaux.

Je me réjouis d’avoir pu, avec les 31 autres membres de la Task Force, produire en si peu de temps un rapport faisant consensus et ayant vocation à être une référence dans les 20 pays du G20, représentant une immense part du PNB mondial. Le rapport est soutenu depuis son émission le 29 juin dernier, par une centaine de PDG de grandes entreprises, dont Punit Renjen, le CEO de Deloitte, et par des institutions financières gérant des actifs de 25 000 milliards de dollars. A l’issue de ces 18 mois de travail, il s’agit désormais de mesurer le taux d’adhésion de nos recommandations et d’accompagner dans leur bonne mise en œuvre les entreprises désireuses de les appliquer, ce à quoi je vais m’atteler avec beaucoup d’autres acteurs dans les mois prochains.

Pour en savoir plus sur ce thème, n’hésitez pas à me contacter.

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